Qu’on soit fan ou détracteur, force est d’admettre que la filmo de
Miike ne cesse de surprendre. Après avoir fait le tour de la culture
populaire japonaise qu’il n’a cessé d’explorer au détour de genres
ultra codifiés comme le kwaidan eiga, le yakuza eiga ou encore le yokai
eiga, voilà que Raging Takashi s’attaque à un monument pop bien
occidental : le western-spaghetti. Étonnant ? Pas forcément, tant les
liens qui unissent le western italien et le cinéma japonais sont
nombreux et éloquents. Le ronin des chambaras n’est-il pas le reflet du
desperado des westerns ritals, dans son imagerie comme dans ses
thématiques ? Par ailleurs, les Italiens se sont souvent servi de
figures types du cinéma nippon en les insérant au cœur même d’histoire
archétypale du genre spaghetti. Certains acteurs japonais ont même
connu les studios de Cinecittà, comme ce fut le cas de Tetsuya Nakadai
(Goyokin), incarnant le taciturne vilain du très sympathique Cinq
gâchettes d’or, réalisé par Tonino Cervi. Aujourd’hui, c’est au tour de
Miike de jouer la carte de l’importation. Pour ce faire, il choisit en
digne représentant de l’occident le geek le plus égocentrique de la
planète : Quentin Tarantino, qui interprète un certain Ringo (!) dans
le film. Fan number one du Django de Corbucci, Quentin est aussi un fin
connaisseur du genre, à l’instar de son (ex ?)pote Robert Rodriguez,
qui cite depuis ses débuts cinématographiques le western spaghetti
comme source d’inspiration première. D’ailleurs, en zieutant les
premières images du film de Miike, on ne peut s’empêcher de penser aux
délires potaches de Rodriguez tant l’univers azimuté du stakhanoviste
japonais rappelle celui du Mexicain fou. Même univers bigarré où
s’entrechoquent modernité et archaïsme et même volonté décomplexée de
livrer aux spectateurs un spectacle grandiloquent et généreux dans son
approche. Transposition de l’histoire oblige, Miike nous propose de
suivre l’affrontement historique de Genpei, qui a opposé entre 1180 et
1185 le clan Taira au clan Minamoto. Paumé au milieu des balles, un
pistolero mystérieux mieux apprêté que Franco Nero et incarné par le
jeune Hideaki Ito va jouer du canon et donner le « la » avec ses
flingues. Présenté à la Mostra de Venise dans le cadre d’une ÉNORME
rétrospective autour du western italien, le film de Miike a séduit pas
mal de festivaliers par son aspect iconoclaste et son instantanée
loufoquerie. Après l’excellent Les Larmes du tigre noir (thaïlandais,
pour le coup, celui-là), Sukiyaki Western Django sera-t-il l’hommage
ultime à un genre définitivement enterré ? Réponse, on l’espère,
bientôt en France.
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